Interview exclusive de Dominique EHRENGARTH pour le Webmag

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Comment se porte le monde de la librairie aujourd’hui ?

Le monde de la librairie connait une évolution qui est liée à l’évolution du livre lui-même. On a parlé des ventes sur Internet, on parle aujourd’hui du numérique. On dispose d’un petit recul en ce qui concerne les ventes sur Internet, qui représentent aujourd’hui 15% du marché en France. Le numérique en est encore à ses débuts, il représente actuellement environ 1,2% des ventes, mais il y aura certainement des évolutions importantes dans les prochaines années. Pour le moment, on ne sait pas encore très bien ou on va, tout le monde se cherche, mais il est certain que le numérique va apporter des acteurs différents de ceux que nous connaissions jusqu’à présent. On peut par exemple imaginer que le livre numérique soit vendu par des professionnels de l’informatique, d’où des interrogations très fortes de la part des libraires. En terme de ventes, ou de circuits de ventes, il existe des pays au monde où les librairies indépendantes ont quasiment disparus, la Grande-Bretagne par exemple, ne connait pratiquement plus que des librairies hyperspécialisées ou de la librairie ancienne. D’autres pays autour de nous connaissent des fermetures fréquentes et importantes de librairies indépendantes. Toute la filière du livre connait des mutations importantes, et la librairie indépendante en fait partie. En France, il y a des structures un peu particulières, il y a également l’exception culturelle française qui une fois de plus se vérifie, nous avons la chance d’avoir une très grande production littéraire et nous avons cette fameuse loi, dite loi Lang qui instaure le prix unique

Le prix du livre étant unique, quel est l’avantage pour le consommateur de venir en librairie ?

Le consommateur qui achète sur Internet cherche un livre précis qu’il a envie d’acheter à tout moment du jour ou de la nuit, alors que celui qui vient en librairie cherche un contact, une information, un conseil, un service, une présence, un échange, qui sont autant de choses fondamentales. Le libraire n’est pas simplement un marchand, mais avant tout un amoureux des livres et un passionné de la lecture qui va avoir un échange tout à fait particulier et enrichissant avec son client. Il faut toutefois différencier deux types de librairies, les grandes chaines qui méconnaissent souvent une grande partie de la production des livres qui existent en France, alors  que le libraire indépendant connait, du moins j’ose l’espérer les 100% de cette production.

A vos yeux, qu’est ce qui a changé à Neudorf pour votre activité au cours des 10 dernières années ?

Ce qui a changé pour notre activité, comme pour toutes les autres d’ailleurs, ce sont les très grosses mutations urbanistiques, l’arrivée du tram et de son tracé a créé des circuits de circulation différents de ceux que nous avons pu connaitre par le passé, a coupé des liens, a rejeté des flux et a créé des impasses. Il est indéniable que le centre de gravité de Neudorf se déplace vers le nord. En ce qui nous concerne, nous avons beaucoup souffert des travaux du tram, ainsi que du fait de nous trouver dans la partie sud de la route du Polygone qui est devenue une espèce d’impasse et qui a connu une désertification commerciale, il n’y a qu’à voir tous les magasins vides tout autour de nous.

Quels sont vos projets pour 2013 ?

Notre rôle de libraire est d’être la passerelle entre le lecteur et l’auteur. Il est bien-sûr plus facile d’accueillir un auteur local pour lui faire rencontrer son lectorat, mais le fait d’accueillir des auteurs nationaux fait également partie de nos ambitions. Nous avons eu un programme de rencontres très riche en fin d’année 2012 et nous allons continuer dans ce sens. Dès le 26 janvier, nous allons recevoir Eric Genetet, que beaucoup de Strasbourgeois connaissent puisqu’il a également sévi sur une radio locale. A côté de cela nous participerons évidemment toujours à des animations en dehors du magasin (salons, festivals, etc…), à Strasbourg ou ailleurs. Nous sommes membre de l’association « Alsace bande dessinée » depuis 5 ans, et participons à Strasbulles. Nous y serons une nouvelle fois présents cette année, avec d’ailleurs une activité renforcée de promotion de la création de bandes-dessinées alsaciennes, dont beaucoup de nouveauté à venir lors du premier trimestre 2013.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l’Association des Libraires Indépendants du Rhin qui a vu le jour en 2012 et dont vous êtes le président ?

Depuis plusieurs années, les libraires indépendants d’alsace se croisaient lors de différentes manifestation, et à chaque fois nous nous disions « il faudrait faire quelque chose… ». Au mois de mars 2012, mais aussi près les assises de la librairie qui se sont tenues en 2011, lors desquelles est sorti un constat assez négatif des résultats de la profession qui ne se porte pas très très bien, deux libraires ont pris l’initiative de réunir tout le monde. Nous nous sommes donc retrouvés à écouter le Président de la Fédération des Associations qui nous a expliqué ce qui se passait dans d’autres régions. Nous avons à ce moment-là décidé de créer notre association qui compte aujourd’hui 28 membres sur un potentiel d’une trentaine, ce qui est très riche. Le plus étonnant étant la disproportion qui existe entre le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, le Haut-Rhin ne comptant plus que 4 ou 5 librairies indépendantes alors que le Bas-Rhin est beaucoup plus riche en la matière. L’association A.lir est entrain de mettre en place un contrat avec l’état, représenté par la Direction Régionales des Affaires Culturelles (DRAC), la Région Alsace, l’association des Illustrateurs et l’Association des Editeurs en Alsace, visant à mettre en place une structure de promotion et de développement de la filière du livre en Alsace. Ce qui était une attente de longue date puisque l’Alsace est la seule région qui n’a pas de Centre Régional du Livre.

GFR 15/01/13 www.e-neudorf.fr